Hérons cendrés (adulte et juvéniles) - Pécrot - Luc Claes

Une nidification de Hérons cendrés à Pécrot

Auteur et photos : Luc Claes

Ce matin du début du mois de mars 2018, mon regard est attiré par la curieuse position d’un Héron cendré, à une centaine de mètres à l’ouest de l’étang. Parfaitement immobile, comme à son habitude, il est posé sur un amas de branchages qui ressemble à… un nid.

Ce ‘nid’ est posé au sommet d’un arbre mort, solidement calé entre plusieurs branches. Cette situation me semblait incongrue à plus d’un titre. Ne m’avait-on pas appris que les hérons établissaient leurs nids en colonies ? Et puis cette attitude, hiératique, debout dans le nid, ne correspond pas à l’image que je me fais d’une couvaison. Je prends quelques photos … affaire à suivre.

Le 30 mars, je reviens sur mon site-fétiche pour y découvrir un héron toujours posé, debout, sur le ‘nid’. Comme si rien n’avait bougé en quatre semaines. Est-ce vraiment un nid de héron ou bien un ‘gros’ nid de corvidé servant de perchoir opportun ?

Le 4 avril, le nid semble être vide … Mais, à y regarder de plus près, un héron s’y trouve, bien camouflé, en position typique de couvaison. Là, le doute n’est plus permis ! Les 13, 18 et 26 avril, même type d’observation : un héron en position de couvaison, se levant de temps en temps comme pour se dégourdir les pattes.

M’étant absenté pour un voyage (…), je ne reviens sur le site que le 26 mai. Et là, j’ai la bonne surprise de voir émerger du nid, tour à tour, deux adorables ‘têtes blondes’. Je dois vous avouer embellir le tableau : le jeune héron présente une esthétique comment dire … un peu rude. Leur taille s’approchait déjà de celle de l’adulte avec, cependant, un bec aux dimensions plus modestes.

Que peut-on lire concernant la nidification des Hérons cendrés ?

Les hérons nichent en colonies (héronnières) au sommet des arbres. Des nids isolés présagent parfois la fondation d’une nouvelle colonie.

Le nid est une plate-forme faite de rameaux de bois et de roseaux, ainsi que de laîches. Les matériaux varient avec l’habitat. A l’intérieur de cette grande structure, le Héron cendré façonne un creux avec des brindilles, des joncs et de l’herbe. Ce nid peut servir plusieurs années de suite.

Le mâle apporte les matériaux et la femelle, qui reste au nid presque toute la journée, assure la construction en entrelaçant les branches et les laîches. Chaque fois que le mâle revient au nid, on assiste au cérémonial de la parade nuptiale, qui se poursuit aussi pendant la période d’incubation.

Dans nos régions, la nidification commence de février à avril. La femelle pond une moyenne de 4 à 5 œufs bleu clair, à 2 jours d’intervalle. Les deux parents partagent l’incubation qui dure 25 jours en moyenne.

Les jeunes sont nourris par les deux parents. Incités par les petits coups de bec des jeunes, ceux-ci régurgitent la nourriture que les poussins prennent directement dans le bec des adultes. Les jeunes ne volent pas très bien avant l’âge de 55 jours. Ils ne s’émancipent véritablement que 2 à 3 semaines après l’envol.

Le succès d’une nidification dépend largement de la disponibilité de nourriture. Les jeunes hérons sont nourris 3-4 fois par jour et par parent, principalement à l’aube et en soirée. Il a été estimé qu’une nichée de hérons reçoit en moyenne 115 kg de nourriture avant son indépendance. Fait interpellant : il a été observé que les fratricides sont bien plus importants comme cause de décès des jeunes que d’autres causes classiques (prédation, …).

Dans le cas de Pécrot, le nombre de deux jeunes à l’envol correspondrait à la moyenne. Les nidifications en grandes héronnières seraient légèrement plus prolifiques (3 et plus).

Et pour 2019 ? Lors de mes dernières visites sur le site, je ne trouvais plus de trace du nid: serait-il depuis masqué par la végétation ? Je m’inquiétais aussi des opérations de curage de la Marbaise, le long de l’étang, qui ont profondément modifié l’environnement en le rendant plus ‘civilisé’.

Pour en avoir le cœur net, je me suis rendu dans la zone du nid. Roseaux, enchevêtrements de branchages et de ronces : le secteur est difficile d’accès. Après une petite heure de recherches, je finis par découvrir l’arbre au nid… sous forme de chablis. Déraciné depuis plusieurs semaines déjà !

Puisse, malgré tout, la nidification de 2018 ne pas rester sans lendemain et les hérons trouver un nouveau support, plus pérenne.

 

Héron cendré - Pécrot - Luc Claes
Héron cendré – Pécrot – Luc Claes

Sources :

  • http://www.oiseaux-birds.com/fiche-heron-cendre.html
  • http://www.oiseaux.net/oiseaux/heron.cendre.html
  • Paul Géroudet, 2009 – Grands échassiers, Gallinacées, Râles d’Europe – Delachaux & Niestlé, Octobre 2009.
  • Dariusz Jakubas, 2005 – Factors affecting the breeding success of the grey heron (Ardea cinerea) in northern Poland – Journal of Ornithology · January 2005.
  • Janine van Vessem and Dirk Draulans, 1986 – The Adaptive Significance of Colonial Breeding in the Grey Heron Ardea cinerea: Inter- and Intra-Colony Variability in Breeding Success, Ornis Scandinavica (Scandinavian Journal of Ornithology)
    Vol. 17, No. 4 (Dec., 1986), pp. 356-362 (7 pages).