Le coucou

Auteur : Thierry Maniquet
Photo d'entête : Coucou gris - Nathalie Annoye
Article publié en 2011 dans le Bruant Wallon n°11

Nous attirons votre attention sur le fait que les informations contenues dans cet article ont 9 ans. La nature a bien sûr évolué durant cette période…

Oiseau bien connu de nos printemps en raison de son chant caractéristique, le coucou, de par sa discrétion et ses mœurs particulières est toutefois à l’origine de bien des croyances et légendes.

De nombreuses rubriques « Le saviez-vous ? » pourraient lui être consacrées avant que le sujet ne soit épuisé. Aujourd’hui, je me limiterai à évoquer certaines croyances et légendes peut-être moins connues.

Savez-vous tout d’abord que dans le folklore slave (mais aussi européen), le coucou apparaît comme l’allégorie d’une veuve, pleurant son mari disparu. Ecoutez dans ce poème russe du XIIe siècle la détresse de Jaroslavna pleurant la mort de son mari Igor1 : “ Je volerai, dit-elle, comme le coucou, le long du Danube, je tremperai ma manche de castor dans la rivière Kajala et je laverai sur son corps puissant les plaies sanglantes de (mon) prince ”.

Il est du reste assez troublant de constater qu’en russe, le verbe « kukovat » («coucouler», verbe traduisant le chant du coucou) est aussi synonyme de « languir, mener une vie solitaire », et dans certains dialectes biélorusses ou russes, « pleurer, se plaindre, crier, souffrir ».

Si le coucou se manifeste essentiellement par son chant, c’est toutefois pendant une très courte période ; on dit ainsi qu’il ne chante que du premier jour de Pâques jusqu’à la Saint-Pierre (29 juin). Ce chant était autrefois prémonitoire : le nombre de ses notes correspondait au nombre d’années qu’il restait à être célibataire, ou pire à vivre, pour celui qui l’entendait.

Une fois devenu silencieux, on considérait qu’il s’était transformé en faucon, ou plus souvent encore, en épervier, en raison de leur ressemblance.

Ce chant « coucou, cocuc, coucut, coucu » ne veut aussi rien dire d’autre, dans d’autres traditions, que « cocu », l’oiseau devenant ainsi symbole d’infidélité. Parmi les différentes explications avancées, le coucou avertirait ainsi le mari jaloux du libertinage de son épouse.

Quant au fait que le jeune coucou, à peine sorti de l’oeuf, ne songe qu’à expulser les oeufs de ses « frères et soeurs adoptifs », vous pensez bien que cela n’a guère servi sa cause : « le coucou est un des plus épouvantables emblèmes d’infamie que la nature a forgés. C’est un miroir de perversité omnimode qui reflète avec une intensité étrange les sept nuances de la gamme du vice, dite des sept péchés capitaux…. »2 .

Terminons cette brève chronique, si vous le voulez, par une note plus souriante.

Savez-vous pourquoi le coucou est devenu l’un des symboles de Botnang, village allemand, devenu aujourd’hui un quartier de Stuttgart ?

Au XVème siècle, le Duc Ulrich VI de Wurtemberg réclama aux habitants de Botnang le nid du coucou (!?) qu’il avait entendu avec ravissement dans le bois de la localité. Les habitants, intrigués par cette demande, s’interrogeaient sur le fait de savoir si le Duc s’était moqué d’eux ou était à ce point ignorant des mœurs du coucou.

Soucieux toutefois de ne pas indisposer le Duc, ils décidèrent, à défaut de nid, de lui faire don d’une partie de la forêt dans laquelle chantait le coucou.

C’est depuis lors que les habitants de Botnang se moquent gentiment de leur naïveté et que le coucou est devenu symbole de leur quartier.

1 « Dit de la campagne d’Igor », poème russe.
2 Texte d’Alphonse Toussenel (1803-1885)

Sources

  • G. KALABOVA, Le mari-serpent ou pourquoi le coucou coucoule,
  • http://savoir-du-monde.fr/Coucou (site plus accessible)
  • B. BERTRAND, Le bestiaire sauvage, Histoires et légendes des animaux de nos campagnes, Plume de Carotte, 2006, 104